Bertsolarisme
Bertsolari, en euskara, c'est celui qui compose et chante des bertsos (vers). Le bertsolarisme est une forme d'expression orale improvisée, très enracinée dans la littérature populaire basque. La tradition, qui remonte au minimum aux dames qui improvisaient en vers au XVe siècle, connaît un moment créatif sans précédent. Le genre qui a fait des adeptes est devenu un spectacle qui attire.
Mendian gora haritza ahuntzak haitzean dabiltza itsasoaren arimak dakar ur gainean bitsa. Kantatu nahi dut bizitza usteltzen ez bazait hitza mundua dantzan jarriko nuke Jainkoa banintza.
379. L'auteur de ces bertsos populaires est Xabier Amuriza (1941, Zornotza),
considéré comme le grand rénovateur de cet art dans les années
1980. Ecrivain prolifique et chercheur, poète et essayiste, il a impulsé
la technique et l'enseignement des bertsolaris de notre époque,
qu'il a révolutionné. 380. Le bertsolarisme est une joute orale improvisée au cours de laquelle
les bertsolaris dialoguent et se répondent, en devant s'en tenir à un
thème donné et à la métrique. Le bertso se divise en points, et chaque
point, suivant la métrique, présente un certaine nombre de syllabes. 381. Kepa Enbeita Urretxindorra, (Muxika, 1878-1942). Il montre la
voie qui conduira le bertsolarisme des cidreries au théâtre, dans la
période d'avant la guerre. 382. Les championnats seront le moteur de ce bertsolarisme de la
résistance (1960-1979). Auspoa, la collection créée par Antonio Zavala
en 1964, recueille les bertsos improvisés lors de ces finales. La
collection, poursuivie par la maison d'édition Sendoa, est aujourd'-
hui sous la tutelle de la Députation Forale de Gipuzkoa; elle dépasse
les 300 volumes, qui constituent un véritable joyau de la littérature
orale. 383. Les bertsos, tout comme les bertsolaris, remplissent une fonction
sociale. Ils traitent tous les thèmes et s'attardent sur l'histoire et
l'actualité, donnant libre cours aux préoccupations de toutes les
couches sociales : de l'avion au téléphone portable, de la répression
sous la dictature aux interdictions au moment de la Transition,
du chômage au racisme, du sexe à l'immigration. 384. Txirrita, Jose Manuel Lujanbio (Hernani, 1860-1936), est le paradigme
du bertsolarisme classique qui trouve un terrain favorable
dans les cidreries à la fin du XIXe siècle et au début du XXe. 385. Iñaki Eizmendi, Basarri (Errezil, 1913) et Manuel Olaizola, Uztapide (Zestoa, 1909-1983) furent un couple habituel sur les places. Basarri
et Uztapide, entre autres, assurèrent la continuité et le développement
du bertsolarisme dans l'après-guerre, une époque dans laquelle
c'était pratiquement la seule activité en euskara tolérée par le régime. 386. Fernando Aire Xalbador (Urepel, 1920-1976). Berger et bertsolari.
Outre ses bertsos écrits, dont beaucoup sont devenus des chansons,
Xalbador fut un extraordinaire improvisateur, doté d'une sensibilité
poétique hors du commun. 387. Les tonalités les plus utilisées sont le zortziko majeur, le zortziko
mineur, l'hamarreko majeur et l'hamarreko mineur, chacune respectant
des métriques et des mélodies différentes pour aborder un thème ou un
autre. Le poto est une faute qui consiste dans la répétition d'un mot
rime toléré sur les places, mais pénalisé lors des championnats. 388. Maialen Lujanbio, championne en 2009. 389. A la fin des années 1950, Euskaltzaindia sillonne le pays à la
recherche de bertsolaris et organise des compétitions territoriales.
Le résultat en est le Championnat d'Euskal Herria que l'Académie
de la langue basque organise en 1960. 390. Au sein de l'élite des bertsolaris, une génération cultivée et
créative triomphe aujourd'hui qui intègre dans ses textes le meilleur
de la tradition orale avec la littérature actuelle, la BD ou le cinéma.
Le philologue et écrivain Andoni Egaña (Zarautz, 1961), champion
toutes catégories à quatre reprises (de 1993 à 2005), est le fer de
lance de ce nouveau bertsolarisme. 391. A l'heure actuelle, les joutes orales prennent les formes les plus
variées : autour d'une table, spectacles sur les places, festivals, championnats
et hommages. Parmi les nouvelles formes, les sessions thématiques,
les sessions associant des musiciens (bertso jazz) voir le cabaret. 392. Pernando Amezketarra (Amezketa, 1764-1823) fut un bertsolari
guipuzcoan, célèbre pour son humour et sa lucidité. Ses histoires, qui
appartiennent à l'acquis populaire basque, sont à l'origine en 1981 d'une
série de dessins animés dirigée par le réalisateur Juanba Berasategi. 393. Le premier championnat de bertsolaris fut impulsé en 1934
par Joxe Ariztimuño, Aitzol, avec son règlement, son jury et ses prix.
Les championnats sortirent cet art des cidreries et les transformèrent en
une occasion solennelle. Le public effectua, lui aussi, sa mutation :
aux amateurs de toujours vint se joindre la couche intellectuelle. 394. Le grand boom du bertsolarisme se produit à la fin des années
1980 avec une nouvelle génération de bertsolaris : Sebastian Lizaso,
Jon Enbeita, Jon Sarasua, Jon Lopategi, Angel Mari Peñagarikano, Iñaki
Murua et Andoni Egaña. Le lancement d'un programme de télévision
faisant la part belle au bertsolarisme, Hitzetik Hortzera (1988), accompagne
ce succès. On peut dire que fin 1993, les bertsolaris sont devenus
des personnages connus de la culture basque. 395. Lors de la finale du championnat 2009, quinze mille spectateurs
se pressent sur les travées du Bilbao Exhibition Center pour suivre la
prestation des huit finalistes, et applaudir le triomphe de Maialen Lujanbio
(Hernani, 1976), première femme bertsolari à porter le béret (en
basque, txapela) de championne. 396. Affiche annonçant un championnat de bertsolaris à Getxo. 397. Bertso eskolak, les écoles de bertsularis, jouent un rôle important
dans la transmission entre enfants et adolescents de cette forme
littéraire; à ce jour, il en existe une centaine qui fonctionnent à travers
tout le pays. Amaia Iturrioz au XXIe Championnat Scolaire des
Bertsularis du Pays Basque.