L’euskara dans la république
Dans les années 1930, après des décennies de valse-hésitation dans la
politique espagnole, l'euskara vit un moment d'espoir; il profite même
d'un début de sa reconnaissance sociale. En pleine renaissance culturelle,
la poésie et le théâtre connaissent un regain de popularité. La
presse en euskara s'enrichit de magazines et d'hebdomadaires auxquels
de grandes plumes incarnant le renouveau apportent le prestige.
En dépit des entraves de l'administration centrale, la volonté d'en faire
une langue pleinement de culture s'ouvre sur l'enseignement en portant
les premières ikastolas sur les fonts baptismaux. La culture basque,
relativement revigorée au lendemain des guerres carlistes, connaît en
ces années un moment privilégié. Moment fugace, à l'image des autres
mouvements culturels et populaires, car le soulèvement militaire franquiste
va constituer un terrible coup d'arrêt.
191. Au lendemain du coup d'Etat de Primo de Rivera en 1923, son gouvernement
impose la primauté du castillan dans l'enseignement, les églises
et la vie publique. Avec l'instauration de la Seconde république
(1931-1936) et le transfert aux régions de l'enseignement, de nombreuses
voix s'élèvent pour demander que l'instruction soit dispensée en langue
maternelle. Toutefois, on doit attendre octobre 1936 pour que l'eus-
kera devienne langue officielle, sous l'empire du statut d'autonomie proclamé
par le gouvernement basque. Pour alors, la guerre a commencé. 192. Tene Mujika (Robustiana Mugika Egaña, Deba, 1888-1981), est l'une
des premières femmes écrivaines en langue basque. Elle publie des contes,
des pièces de théâtre et des essais. Dans ces années on publiera aussi les poétesses
modernistes Frantziska Astibia, Onintze, et Sorne Unzueta, Utarsus. 193. La première ikastola est créée par Resurrección María de Azkue à
Bilbao en 1896; la seconde par la famille Muñoa à Saint-Sébastien en
1914. Celle-ci ne comptera pas moins de 300 élèves. Les ikastolas s'asso-
cient pour la première fois au sein d'Euzko Ikastola Batza (1932). De l'é-
poque datent aussi les premiers livres de texte en euskara, comme celuici
: Xabiertxo, dans sa première édition de 1925, de l'éditeur de Tolosa
Isaac López de Mendizabal. 194. Illustrations de Jon Zabalo Txiki (Manchester 1892-1948). 195. On considère Txomin Agirre (Ondarroa, 1864-1920) comme le
créateur du roman basque. Il est aussi l'auteur de romans de moeurs
comme Auñamendiko Lorea en 1898, Kresala (1906) et Garoa (1912). 196. Le compositeur de langue basque Maurice Ravel (Ciboure, 1875-
1937) s'érige en porte-drapeau de l'impressionnisme musical européen.
Des oeuvres composées à partir de thèmes basques comme Trio,
Zazpiak bat, Euskal kontzertua figurent à son répertoire. Ce timbre a été
réalisé à Monaco pour commémorer le centenaire de sa naissance. 197. Couverture d'Euskal Ordua, publiée à Montevideo (Uruguay) en 1934. 198. Affiche de Aurelio Arteta. 199. Théâtre Arriaga. Bilbao. 200. Xabier de Lizardi (Jose Maria Aguirre Egaña, (Zarautz, 1896-1933).
Poète et écrivain de talent, représente avec Estepan Urkiaga Lauaxeta
(Laukiz, 1905-1937), le meilleur de la littérature d'avant-guerre. Son
oeuvre poétique, –Biotz-begietan (1932) ou l'anthologie posthume
Umezurtz-olerkiak (1934)- marque le passage du romantisme au
symbolisme dans la littérature basque. Il écrit aussi des pièces de théâtre
et de la prose. Prenant une part active à Euskaltzaleak, il ne cessera
de poursuivre le rêve d'un journal intégralement en euskara. 201. Aitzol, José de Ariztimuño (1896-1936), sera le chef de file de
la seconde renaissance basque à partir de 1930, à la tête de la
société savante Euskaltzaleak. Organisant des fêtes annuelles de
poésie et de théâtre basque (Bertsolari Guduak), publiant le journal
bilingue El Día (1930-36) et la revue Yakintza (1933-37). Le groupe
de poètes qu'il réunit autour d'Euskaltzaleak (Lizardi, Lauaxeta,
Orixe et Loramendi) sera l'un des carrefours de production lyrique
parmi les plus en flèche de la littérature basque. Fait prisonnier par
les putschistes, il sera fusillé à Hernani en octobre 1936. 202. L'héroïne populaire de BD Bécassine vit cette histoire en 1925
au Pays Basque, érigé en destination exotique à découvrir pour les
publics francophone et anglophone. 203. Statue de La Liberté dans l'île de la Liberté. 204. Publicité pour des voyages transatlantiques vers tous les continents. 205. Avant 1936, une dizaine d'hebdomadaires sont édités en euskara.
Parmi leurs chroniqueurs, figurent Fermín Irigaray Larreko (Auritz 1869-
1949) et Enrike Zubiri Manezaundi (Luzaide, 1867-1943). Dans la revue Euskaltzale l'écrivain populaire Ebaristo Bustintza Kirikiño (Mañaria,
1886-1929) fait ses premières armes en tant que chroniqueur. En 1921,
on assiste à la naissance d'Argia à Saint-Sébastien. En Pays basque nord,
citons l'hebdomadaire conservateur Eskualduna (Bayonne, 1887-1944),
autour duquel gravite le groupe d'écrivains Gizaldi gaztea, composé par
Jean Etxepare, Jean Barbier et Jules Moulier Oxobi. 206. Vers la fin du XIXe et au début du XXe siècle, des centaines de
milliers de Basques partent s'installer aux Etats-Unis. Constituant une
communauté dotée d'une personnalité forte basée sur l'attachement
aux racines. A leur image, Lucy Garatea débarque de son Lekeitio
(Bizkaia) natal à Ellis Island. Lucy sera la protagoniste de l'exposition
Hidden in Plain Sight: The Basques (Cachés au vu de tous; les Basques)
inaugurée en février 2010 dans les salles que foulaient les émigrants
quand ils foulaient pour la première fois le sol américain. Partant vers
l'ouest, les Basques étaient reçus à New York par d'autres bascophones,
avant de prendre la route vers l'Oregon, le Nevada ou l'Idaho. 207. Plaque minéralogique de l'Idaho.