La consolidation basque
L'euskara batua est devenu langue unifiée, la création littéraire en euskara vit un grand changement. Le roman comme la poésie délaissent la tradition costumbrista pour se frotter à l'existentialisme et s'essayer à la modernité. Euskaltzaindia met en place le corpus de la langue. Il s'attache à développer ses textes normatifs et grammaticaux, ses dictionnaires. La recherche et la science commencent à penser en euskara. L'Université d'été pose les jalons de l'actuelle Université publique basque.
247. L'euskara batua. Le processus d'unification de l'euskara interrom-pu par la parenthèse franquiste doit être relancé. En octobre
1968 à Arantzazu se déroule le Congrès d'Euskaltzaindia. Ce congrès
représente l'occasion rêvée pour jeter les bases de l'unification linguistique
et la définition de l'euskara batua. 248. Oeuvre de Nestor Basterretxea. 249. Jose Antonio Sistiaga (Saint Sébastien 1932), devant son oeuvre
cinématographique Ere erera baleibu izik subua aruaren...1968-70.
Film muet de 75 minutes, réalisé en appliquant de la peinture directement
sur la celluloïd de 35 mm. 250. Avant la création de l'Université du Pays Basque EHU-UPV en
1980, l'euskara n'était nullement absent dans la vie universitaire : en
1974, le professeur agrégé de chimie Jacinto Iturbe soutient la première
thèse en euskara; imité par le cardiologue Rikardo Arrue qui soutient à
son tour la première thèse dans cette discipline en langue basque.
Cependant qu'à la Faculté de chimie de Saint-Sébastien, on commence
à enseigner quelques matières en euskara (1976). En 1977, Koldo Mitxelena
se voit confier la toute nouvelle chaire d'euskara au Colegio Universitario
Alavés, Henrike Knörr est son assistant. En 1978, dans les Ecoles
d'enseignement des maîtres de Bilbao et de Saint-Sébastien on crée
la spécialité de philologie basque, et en 1979 est prononcé le premier
cours entièrement en euskara en matière de biologie, géologie et chimie. 251. Mikel Laboa (San Sebastián 1934-2008) inaugure cette période
avec son disque Haika mutil (1969) et la couronne avec Joxan Artze,
avec la première, en 1976, d'un spectacle qui brise les tabous, Ikimilikiliklik!.
Comme d'autres auteurs-interprètes, à l'époque, ils remplissent
les places, les théâtres et les frontons. On peut les considérer
comme les artisans du rapprochement à l'euskara du grand public à
travers la musique. 252. Udako Euskal Unibertsitatea, (Université basque d'été) naît dans la
foulée du succès remporté par les Semaines basques de Bayonne de
1970-72. Ses premiers cours d'été sont organisés à Saint-Jean-de-Luz, en
1973. Les programmes appliqués à Pampelune, à partir de 1977, couvrent
dorénavant toute l'année, notamment dans les matières scientifiques
et sociales. 253. Les films Pelotari (1964) et Amalur (1968) de Nestor Basterretxea
et Fernando Larruquert sont les premières productions cinématographiques
sur des thèmes basques. Dans la même veine, signalons des
documentaires comme Navarra cuatro estaciones (1971), de Julio
Caro Baroja et Navarra agreste (1972), de Rafa Treku. 254. Les arts plastiques vivent un moment très intéressant. En peinture
: Rafa Ruiz Balerdi, Bixente Ameztoi, Andres Nagel, Mentxu Gal
ou Jose Luis Zumeta. En sculpture : Nestor Basterretxea, Remigio
Mendiburu, Vicente Larrea ou Ricardo Ugarte. La musique compte
dans ses rangs des compositeurs de l'envergure de Luis Isasa, Luis
de Pablo ou Agustín Gonzalez Azilu. Ouvre de Jose Luis Zumeta. 255. En Navarre, plusieurs intellectuels appellent la communauté
euskaldun à redorer le blason de sa culture et à l'apprécier. Miguel
Javier Urmeneta (Pampelune 1915-1988) est l'un des promoteurs de
la Section pour la promotion du Vascuence de la Députation, que
dirige Pedro Diez de Ultzurrun (Pampelune 1924-1994), et qui
prend les rênes de nombreuses activités dans l'idée de redonner à
la langue sa véritable place. A la revue en euskara Príncipe de Viana
(1966) collaborent avec eux des gens comme l'ethnographe José
Maria Satrustegi, José Agerre ou Aingeru Irigarai. 256. Jean Mirande (Paris, 1925-1972). Souletin de naissance, Mirande
écrit Haur besoetakoa un roman qui émeut le lecteur. Interdit à diverses
reprises, il est publié en 1970. Son succès lui assure de multiples
éditions. Il créera avec Txomin Peillen la revue Igela, euskaldun heterodoxoen
errebista (1962). 257. Gabriel Aresti (Bilbao, 1933-1975) renouvelle et modernise la poésie basque. Ses recueils Harri eta herri (1964), Euskal harria
(1968) et Harrizko herri hau (1971) propulsent la poésie basque
dans le réalisme social, au point de créer un monde imaginaire
nouveau. Il cultive par ailleurs le théâtre, les contes et le roman. Il
livre de nombreuses traductions de poètes consacrés. Autour de
l'oeuvre d'Aresti voit le jour le mouvement poétique Uhin Berri. On
considère son poème Maldan behera (1959) comme le premier
ouvrage rédigé dans ce que l'on prendra l'habitude d'appeler euskera
batua, l'euskara unifié. 258. Jose Luis Alvarez Enparantza, Txillardegi (Saint-Sébastien, 1929),
avec son roman Leturiaren egunkari ezkutua (1957), jette des ponts
entre l'existentialisme et la narration en euskara, qui abandonne la
tradition costumbrista pour s'essayer à la modernité. Ingénieur et linguiste
de formation, il est nommé professeur émérite de l'Université
du Pays basque. Considéré comme l'un de nos meilleurs sociolinguistes,
son rôle sera décisif dans la construction de l'euskera batua,
pour lequel il milita résolument. 259. La crise qui frappe l'économie basque au milieu des années
1970 est porteuse de grands changements (émigration, chômage,
désindustrialisation). Ceux-ci ne manquent pas d'en affecter toutes
les structures. A partir de 1975, les défenseurs d'une identité nationale
basque gagnent du terrain dans la société et, dès la fin du franquisme,
ce bouillonnement rejaillit sur les arts et la culture. Ses
chefs de file reprennent avec enthousiasme la défense de l'euskara
comme patrimoine commun. La présence de la langue basque
gagne du terrain et, avec elle, la demande insistante de sa reconnaissance
comme langue officielle. 260. Logo de la première campagne en faveur de l'utilisation de l'euska-
ra dans la société, lancée par la Députation forale de Gipuzkoa en 1982.