Le grand atout du chemin de fer -le faible frottement entre la roue et le rail en acier qui permet de traîner de grands chargements sans effort- devient un inconvénient à l'heure de grimper car les locomotives glissent facilement devant le moindre obstacle. Des pentes de plus de 3% sont presque infranchissables pour les trains conventionnels, qui doivent recourir à d'autres systèmes, comme les trains à crémaillère ou les funiculaires.
Dans un territoire comme le Gipuzkoa, où l'orographie est très accidentée, la pose des voies ferrées ne fut possible qu'avec la réalisation de remarquables ouvrages de génie civil.
Grâce à la construction d'audacieux viaducs qui traversaient vallées et rivières, et à la perforation de grands tunnels pour franchir les montagnes, le Gipuzkoa fut en mesure de jouir d'un réseau ferroviaire viable.
Les grands travaux de génie ferroviaire commencent au Gipuzkoa par la construction du Chemin de Fer du Nord. Un total de 22 tunnels, qui totalisent 10.402 mètres de parcours dans les profondeurs de la terre, jalonnent la dure ascension de Beasain à Alsasua. Il faut surtout mentionner le tunnel d'Oazurza, qui avec ses 2957 mètres fut le plus long du pays au moment de sa construction en 1863, et qui détient encore à l'heure actuelle le record du Pays Basque. Le tracé jusqu'à Irun est complété par neuf autres tunnels, qui totalisent une longueur de 3822 m.
La Compagnie du Nord fut également obligée de construire de grands ponts, parmi lesquels nous devons signaler le viaduc d'Ormaiztegi, à cinq travées métalliques et 389 mètres de long. Il a été récemment mis à la retraite car un nouveau pont en béton a été érigé tout près, mais grâce à l'attachement du village dont il fait partie inséparable, il sera conservé comme monument. Neuf autres viaducs permirent de franchir les lits des principales rivières du Gipuzkoa.
Bien que la philosophie des lignes à voie étroite fut celle d'éviter dans la mesure du possible la réalisation de grands travaux d'infrastructure, les conditions géographiques obligèrent souvent à perforer les entrailles de la terre. Nous en avons un bon exemple dans le chemin de fer du Plazaola , aujourd'hui disparu, et le populaire Topo. Le premier fut construit qntre Andoain et Leiza avec un total de 34 tunnels qui totalisaient 3000 mètres; ils sont utilisés aujourd'hui comme amusement pour les cyclistes et les promeneurs. Le Topo , comme son surnom l'indique, eut recours à 14 tunnels qui représentent 20% de son parcours total, parmi lesquels il faut distinguer la longueur du tunnel nº 2, de 2072 m.
Un exemple singulier du travail bien fait nous est offert par le Chemin de Fer de l' Urola , déjà disparu, construit en 1926 par le Conseil Général du Gipuzkoa. Son audacieuse exécution permet de franchir aisément le cours accidenté de la rivière Urola entre Azkoitia et Urretxu, grâce aux 16 ponts et 17 tunnels construits sur ce court trajet. Son tracé exemplaire est encore aujourd'hui envié par les automobilistes qui circulent dans les parages, et qui supportent l'une des routes les plus tortueuses et à plus grande circulation du Gipuzkoa.
Les Chemins de Fer Vascongados ne purent non plus éviter les grands travaux d'infrastructure: il fallut perforer 28 tunnels au total avec 8288 mètres de long, parmi eux le tunnel ferroviaire le plus court du Gipuzkoa, celui de Mogote, de 26 m. de long, situé entre Deba et Itziar. Tout près, la Société Euskotrenbideak a entrepris la construction du nouveau tunnel d'Arronamendi, d'environ 1200 m., qui permettra d'éliminer l'un des points les plus compliqués de cette ligne, étant donné l'instabilité du versant que parcourt le tracé à rectifier. Le gracieux viaduc métallique de Zumaia et celui non moins attrayant de la courbe d'Orio complètent un parcours où on ne peut oublier les curieux murs de soutènement entre Elgoibar et Alzola. Leurs grosses pierres arrondies semblent s'inspirer directement des constructions de l'Empire des Incas.