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miércoles 18 diciembre 2024





Bertan > Bertan 19 Cerámica popular en Gipuzkoa > Versión en francés: Fours
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Fours

146. Cylindres de terre cuite (bodoques).© Jose López
146. Cylindres de terre cuite (bodoques).© Jose López

Le mode de cuisson connu le plus primitif se réalisait à feu ouvert, comme de manière incroyable cela s'est fait dans un village proche du Pays basque, Ordizan, en Béarn, jusqu'au XIXe siècle. Selon le chercheur R.Coquerel, sur une aire de quelque deux mètres de diamètre et sur un sol argileux ou composé de petites pierres, on étendait une couche de paille bien sèche. Par-dessus, on éparpillait des branchages. Dessus encore, on étendait un manteau de fougères et plusieurs poteries à cuire. A nouveau une autre couche de fougères et encore une couche de poteries. Et ainsi de suite, pour former un cône. Puis on mettait le feu au tout. Une fois les pièces cuites, on couvrait le bûcher de cendres et de mottes de terre pour assurer un lent refroidissement.

147. Tacas montées au moyen de bodoques et briques dans le four de las Ollerías, Elosu (Alava), au musée de céramique populaire du Pays basque.© Jose López
147. Tacas montées au moyen de bodoques et briques dans le four de las Ollerías, Elosu (Alava), au musée de céramique populaire du Pays basque.© Jose López

La séparation des chambres de combustion et de cuisson fut fondamentale dans l'évolution des modes de cuisson des poteries. Ce fait se produit dès le IVe millénaire avant notre ère en Mésopotamie.

Commentant cet extraordinaire progrès dans son passionnant ouvrage "Les Fours", Daniel Rhodes écrit:

Même s'il y avait encore lieu à améliorations, cette disposition de four a été adoptée par la majeure partie des fours des pays méditerranéens et d'Europe jusque dans les temps modernes.

148. Trépieds ('txakurrek'), pour séparer les récipients glacés ou vernissés.© Jose López
148. Trépieds ('txakurrek'), pour séparer les récipients glacés ou vernissés.© Jose López

Par les dessins qui décorent quelques vases grecs, on connaît les fours utilisés au XV e siècle avant notre ère, et l'on peut dire que certains fours navarrais (Irunberri, Atarrabia, four ancien de Tutera, etc.) leur ressemblent sur plus d'un point.

On connaît ces fours comme étant des fours verticaux à tirage ascendant, appelés dans la péninsule ibérique "arabes", puisque c'est la forme sous laquelle ils sont arrivés à notre connaissance et qu'ils semblent avoir été introduits par eux. A l'opposé, en Orient apparaissent (Chine, Japon, Corée...) les fours horizontaux. En d'autres termes, dont le foyer ou chambre de combustion et la cheminée sont pratiquement au même niveau. Il s'agissait de fours de qualité supérieure car on obtenait des températures plus élevées et une distribution plus régulière à l'intérieur.

149. Chambre de combustion dans le four de José Ortiz de Zarate, à Elosu. On peut apprécier la vitrification des pierres de la voûte, due aux températures élevées.© Jose López
149. Chambre de combustion dans le four de José Ortiz de Zarate, à Elosu. On peut apprécier la vitrification des pierres de la voûte, due aux températures élevées.© Jose López

Les fours que nous connaissons au Pays basque sont de plan pratiquement carré, sauf celui de la poterie de Marino Gonzalez à Tafalla et le four moderne de Carmelo Añon à Tutera, tous deux de plan circulaire. Des constructions qui ont toutes deux disparu, malheureusement.

Tous sont ouverts, hormis ceux mentionnés d'Irunberri, Atarrabia et le vieux four de Tutera, dont la chambre de cuisson comportait une voûte en briques, avec quelques orifices pour la sortie des gaz et des fumées, et pour servir de tirage au feu du foyer.

Comme nous l'avons dit précédemment, les poteries étaient posées sur des "tacas" et séparant les récipients glacés ou vernissés par des trépieds en terre cuite pour qu'elles ne collent pas les unes aux autres pendant la cuisson. Txakurrek était le nom qu'on leur donnait à Zegama et dans quelques autres poteries du pays. Nous pouvons observer sur les assiettes et tasses cuites, trois petits points sans bain. Ce sont les endroits où s'appuyaient les petits pieds de ces trépieds.

151. Assiettes et bols portant des noms qui proviennent habituellement de couvents et de confréries.© Jose López
151. Assiettes et bols portant des noms qui proviennent habituellement de couvents et de confréries.© Jose López
152. Bol.© Jose López
152. Bol.© Jose López
153. Tasses ou bols.© Jose López
153. Tasses ou bols.© Jose López
150. Assiettes décorées, portant des motifs usuels dans des tons bleus ou verts, d'autres sont entièrement blanches, parfois avec des noms.© Jose López
150. Assiettes décorées, portant des motifs usuels dans des tons bleus ou verts, d'autres sont entièrement blanches, parfois avec des noms.© Jose López
154. Tasse à anse et bain entier.© Jose López
154. Tasse à anse et bain entier.© Jose López

La charge de récipients dépassait normalement les limites supérieures du four. Partie supérieure qu'on appelait "colme".

Une fois le four chargé, on murait les portes de la chambre de cuisson et l'on recouvrait ce couronnement de tuiles brisées, de tessons de poteries de fournées précédentes, etc.

Alors seulement on allumait le four, d'abord à feu doux, pour qu'il tiédisse, puis en poussant le feu pour atteindre de 900 à 1000 degrés.

155. Tasses imperméabilisées uniquement côté intérieur.© Jose López
155. Tasses imperméabilisées uniquement côté intérieur.© Jose López

Le procédé le plus généralisé, pour connaître l'état de cuisson des poteries, consistait à extraire au moyen d'un crochet métallique des tasses glacées portant les décorations chromatiques utilisées, et placées dans la partie supérieure.

A la vérification plus ou moins du cinquième "test", on jugeait la cuisson achevée. Celle-ci prenait habituellement de 16 à 17 heures. Mais dans certains fours de grandes dimensions, elle pouvait prendre jusqu'à 23 heures.

Dans d'autres poteries, outre ce procédé permettant d'apprécier l'avancement de la cuisson, on employait également la méthode des "regards". Ceux-ci étaient de petits trous pratiqués dans les parois avec lesquelles on fermait les portes de la chambre de cuisson.

156. Bassines, les grandes pour tuer le cochon, les autres pour la vaisselle, ou pour tous types d'usages.© Jose López
156. Bassines, les grandes pour tuer le cochon, les autres pour la vaisselle, ou pour tous types d'usages.© Jose López
157. Bassine à bec verseur.© Jose López
157. Bassine à bec verseur.© Jose López
159. Bassine avec imperméabilisant côtés intérieur et extérieur, provenant de Bergara.© Xabi Otero
159. Bassine avec imperméabilisant côtés intérieur et extérieur, provenant de Bergara.© Xabi Otero
158. Bassine élaborée par le potier Epifanio Galdos, Uribarri Ganboa.© Jose López
158. Bassine élaborée par le potier Epifanio Galdos, Uribarri Ganboa.© Jose López
160. Pot à saindoux, décor gravé et bec verseur.© Jose López
160. Pot à saindoux, décor gravé et bec verseur.© Jose López

Quand le potier observait un changement de couleur sur les tessons de la partie supérieure, lesquels devenaient blanchâtres, il ôtait les bouchons qui obturaient les orifices et, en introduisant un bâtonnet très sec, observait par la lumière qu'ils dégageaient en brûlant l'état de la glaçure ou du vernis, des récipients proches. La cuisson finalisée, il bouchait la gueule de la chambre de combustion pour étouffer le feu et arrêter le tirage.

Pour retirer les pièces du four, il fallait attendre deux jours pour qu'elles refroidissent.

Les pièces qui sortaient fêlées étaient appelées "apeladas". Elles s'entassaient près du four, sur le "testar", en vue de leur utilisation postérieure comme recouvrements de la partie supérieure.

Celles qui avaient vilain aspect étaient appelées "reuses", "ereuses", "rauses". Elles étaient vendues à des particuliers à très bas prix.

161. Pot à saindoux de la ferme San Miguel de Aritzeta, Bergara.© Xabi Otero
161. Pot à saindoux de la ferme San Miguel de Aritzeta, Bergara.© Xabi Otero

Cette opération de cuisson était très délicate. L'apparition du vent du sud, une mauvaise distribution du feu dans le four, un tiédissement défectueux, etc. pouvait mettre à bas un grand nombre d'heures de travail, et signifier la perte de matériaux : argile, glaçures, combustible, etc. Daniel Rhodes disait :

Les potiers ne considèrent pas leurs fours comme les autres artisans considèrent leurs outils. Le four ressemble plus à l'autel d'un holocauste, un ennemi en puissance, un destructeur mais également un ami avec lequel on collabore.

On comprend que les potiers recherchèrent la protection du Très-haut, traçant des croix avec un tesson sur les parois intérieures de la chambre de cuisson avant de charger les poteries; ils en traçaient aussi sur la partie supérieure de la chambre de combustion au moment d'allumer le four ou à la fin; également sur les tessons du couronnement du four, etc. Ils récitaient enfin des prières ou se signaient à certains moments du procès. Et l'on entendait s'élever assez fréquemment à l'issue d'une fournée bien arrivée à son terme, l'exclamation Dieu soit loué.

162. Pot à saindoux élaboré à Narbaxa..© Jose López
162. Pot à saindoux élaboré à Narbaxa..© Jose López

Dans le village d'Ordizan, la cuisson était communautaire. Les familles qui avaient des pièces au feu s'agenouillaient autour, et se mettaient à réciter certaines prières pendant tout le temps que durait la cuisson. Quand on entendait un bruit significatif de bris, ils s'exclamaient à l'unisson "soule assieu" (qu'elle soit la seule !), et redoublaient de ferveur dans leurs prières. Selon Coquerel, il s'agissait d'une cérémonie plutôt païenne, qui rencontrait l'opposition absolue du curé du village. Un rituel dont l'origine devait être aussi ancienne que l'art du potier.

165. Pot à saindoux avec couvercle.© Jose López
165. Pot à saindoux avec couvercle.© Jose López
164. Pot à saindoux.© Jose López, Xabi Otero
164. Pot à saindoux.© Jose López, Xabi Otero
163. Pot à saindoux, décor gravé, élaboré à Uribarri Ganboa.© Jose López
163. Pot à saindoux, décor gravé, élaboré à Uribarri Ganboa.© Jose López
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