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Bertan > Baserria: La ferme basque a Gipuzkoa > Versión en francés: Mode de construction de la ferme

Mode de construction de la ferme



Maîtres charpentiers et tailleurs de pierre

Toutes les anciennes fermes du Gipuzkoa furent édifiées par les maîtres charpentiers et tailleurs de pierre professionnels, qui travaillaient par contrat pour le propriétaire et étaient aidés par une équipe d’ouvriers et de domestiques.

63. Paire de smilles forgées semblables à celles utilisées par les tailleurs de pierre basques.
63. Paire de smilles forgées semblables à celles utilisées par les tailleurs de pierre basques. © Xabi Otero
64. Maître André de Garitano Aldaeta dessina en 1695 ce magnifique projet de maison avec quatres arches de pierre pour rénover la ferme Egino (Bergara).
64. Maître André de Garitano Aldaeta dessina en 1695 ce magnifique projet de maison avec quatres arches de pierre pour rénover la ferme Egino (Bergara). © Xabi Otero

Le maître de maison discutait avec le maître d’oeuvres sur les différentes caractéristiques de la demeure et la somme d’argent qu’il était prêt à verser, et il coopérait fréquemment en transportant à pied d’oeuvre une partie de la pierre, du bois ou de la chaux nécessaires avec sa paire de boeufs.

Le rôle joué par les artisans constructeurs dans la création de l’architecture populaire de Gipuzkoa lui a donné un caractère de robustesse et de qualité qui était peu fréquent dans les demeures des paysans européens. En outre, comme les maîtres travaillaient indistinctement à l’édification d’églises ou de manoirs, ils ne purent éviter de se laisser influencer par les modes de leur temps, ce qui fit que la ferme, sans perdre son caractère fonctionnel et autochtone, fut spécialement sensible aux divers styles artistiques de chaque époque historique.

65. Scie de menuiserie utilisée pour découper des planches et des poutrelles.
65. Scie de menuiserie utilisée pour découper des planches et des poutrelles. © Xabi Otero
66. Le ferme Iraeta (Antzuola) fut conçue en 1796 par Alejo de Miranda, de Bergara, l'un des premiers architectes du Gipuzkoa ayant un diplôme officiel.
66. Le ferme Iraeta (Antzuola) fut conçue en 1796 par Alejo de Miranda, de Bergara, l'un des premiers architectes du Gipuzkoa ayant un diplôme officiel. © Xabi Otero
67. L'herminette était l'outil favori des menuisiers basques pour travailler les poutres et les planches des fermes.
67. L'herminette était l'outil favori des menuisiers basques pour travailler les poutres et les planches des fermes.. © Xabi Otero

Au cours du XVIème siècle et une bonne partie du XVIIème, le maître qui concevait les travaux se chargeait de les diriger pas à pas jusqu’à leur finition, qui était célébrée avec un grand banquet.Vers 1650 cependant, ses fonctions commencèrent à se voir dédoublées et c’est alors qu’apparut le personnage du maître qui concevait, décidait et parfois dessinait le type de ferme à construire, mais qui laissait à d’autres maîtres ou ouvriers moins qualifiés le soin de mettre l’idée en oeuvre. Lorsque la maison était terminée, il retournait la visiter accompagné d’un expert, et décidait de la somme à payer aux entrepreneurs, qui était en fonction de l’adaptation aux plans marqués.

A partir de la fin du XVIIIème siècle, les premiers architectes diplômés commencèrent à intervenir comme responsables des projets des grandes fermes, dont la première fut la maison Iraeta d’Antzuola, dessinée en 1796 par l’académicien de Bergara Alejo de Miranda.

Contrats et plans de construction

Pendant le XVIème siècle, un accord verbal entre le propriétaire et l’artisan constructeur ètait suffisant pour que ce dernier mette le chantier en oeuvre et s’adapte à la commande reçue. Très souvent, c’était le propriétaire, comme premier intéressé, qui suivait de près les travaux et décidait sur le terrain l’achat des matériaux et le salaire des ouvriers.

68. La ferme Iriarte Azpikoa fut construite en 1672 par les Maîtres Joseph de Oxirondo et Jean d'Ibargoitia, selon le plan et les conditions préalablement accordées avec le propriétaire, Jean-Baptiste de Benitua.
68. La ferme Iriarte Azpikoa fut construite en 1672 par les Maîtres Joseph de Oxirondo et Jean d'Ibargoitia, selon le plan et les conditions préalablement accordées avec le propriétaire, Jean-Baptiste de Benitua. © Xabi Otero
69. Plan de la ferme Iriarte Azpikoa (Antxuola) dessiné en 1672.
69. Plan de la ferme Iriarte Azpikoa (Antxuola) dessiné en 1672. © Xabi Otero

Le paysan ne se mêlait pas des aspects techniques, qui faisaient partie du métier appris par le maître artisan, mais il pouvait coopérer avec lui pour prendre des décisions fondamentales, comme par exemple la meilleure orientation de la façade principale de la ferme, qu’on voulait invariablement au soleil du matin.

La qualité finale exigée était élévée, et le processus de construction était extrêmement laborieux, jusqu’au point qu’il pouvait durer jusqu’à deux ans et demi. Il fallait abattre et entraîner des chênes gigantesques, les réduire à des pièces de dimensions différentes, les couper et les assembler à diverses hauteurs, les hausser à force de bras et de poulies rudimentaires tirées par des boeufs. Il fallait extraire les pierres de la carrière au moyen de massues et de pieds-de-chèvre, les travailler finement avec un pic, les transporter dans des chariots et les cimenter avec de la chaux et du sable, qu’il avait fallu d’abord cuire au four avec du bois et d’autres chargements de pierres. A cela il fallait ajouter la fabrication de six ou sept mille tuiles et de plusieurs centaines de clous de fer forgés à la main en un effort similaire, ainsi que la fatigue d’unir tous les éléments cités d’une manière ordonée. On pourra se faire une idée approximative de l’abondance d’énergie humaine engagée dans l’édification de la première génération de fermes du Gipuzkoa.

70. Plume à écrire du XIXème siècle élaborée avec le piquant d'un porc-épic..
70. Plume à écrire du XIXème siècle élaborée avec le piquant d'un porc-épic.. © Xabi Otero
71. Compas de traçage (XIXème siècle)..
71. Compas de traçage (XIXème siècle). © Xabi Otero

Construire une bonne ferme au beua milieu du XVIème siècle coûtait à peu près pareil qu’acheter une douzaine de boeufs de trait. Un tiers du budget était versé avant le commencement des travaux et l’autre tiers au moment de poser la toiture, mais la dernière échéance, qui devait être réglée à la fin de la construction, était toujours ajournée pour être payée au long de plusieurs années sous forme de petites quantités de grains, un peu d’argent en espèces, un animal de la ferme ou quelques chargements de bois de chauffage.

72. Signature autographe de Martín de Abaría.
72. Signature autographe de Martín de Abaría. © Xabi Otero
73. Equerre de construction avec règle graduée et fil à plomb (XIXème siècle).
73. Equerre de construction avec règle graduée et fil à plomb (XIXème siècle). . © Xabi Otero

Depuis la moitié du XVIIème siècle, les contrats de construction des fermes furent régularisés par écrit devant le greffier du village, et très souvent le maître constructeur dessinait un plan ou traza et redigeait un rapport contenant les caractéristiques techniques que les entrepreneurs –charpentiers et tailleurs de pierre- devaient s’engager à respecter. On construisit plus tard de très belles demeures, mais avec de plus en plus de modèles et de catégories différentes: de grandes fermes-manoirs avec des arcs et des blasons en pierre de taille, qui intégraient toutes les nouveautés artistiques de l’époque; des fermes modestes à briques lattées; de grandes bâtisses doubles pour les affermataires et des petites granges en planches et maçonnerie pour les locataires les moins fortunés qui gardaient une partie du troupeau de leur maître en gagnant la moitié des bénéfices. Les maîtres offraient une solution différente pour chaque demande, mais ils conservèrent toujours un style homogène marqué par l’unité culturelle et écologique dans laquelle vivait la campagne de Gipuzkoa.

Les matériaux et les techniques de construction

Dans chaque période historique de la vie de la ferme, il fut possible de mettre en oeuvre des combinaisons multiples avec les matériaux que la terre offrait. Avec trois ingrédients de base uniquement: le bois de chêne, le grès ou la pierre à chaux, et l’argile pouvant se transformer en tuiles ou en briques, savamment mélangés selon diverses techniques et proportions, il fut possible de préparer un menu exquis pour plus de dix types de maison différents.

74. Des techniques de construction différentes qui sont le fruit de divers moments historiques cohabitent dans la ferme Lazarraga à Oñati.
74. Des techniques de construction différentes qui sont le fruit de divers moments historiques cohabitent dans la ferme Lazarraga à Oñati. © Xabi Otero
75. Emboîtement. Technique d'assemblage des planches avec des rainures, utilisée dans les cloisons et les fermetures des fermes du Gipuzkoa au XVIème siècle.
75. Emboîtement. Technique d'assemblage des planches avec des rainures, utilisée dans les cloisons et les fermetures des fermes du Gipuzkoa au XVIème siècle. © Xabi Otero

Les murs arrière et latéraux des fermes du Gipuzkoa –qui ont généralement une surface rectangulaire- sont toujours en maçonnerie. Cependant la façade principale, qui souligne leur identité, peut être fermée par des planches verticales en bois, par des pierres ou par des poutrelles en lattis formant un dessin géométrique. Dans ce dernier cas il existe deux possibilités pour remplir le lattis: avec une maçonnerie légère ou avec des briques massives, comme ce fut la mode pendant la seconde moitié du XVIIème siècle.

76. Ferme Iriarte (Altzo). Les façades en lattis avec les creux en maçonnerie se firent habituelles à la fin du XVIIème siècle.
76. Ferme Iriarte (Altzo). Les façades en lattis avec les creux en maçonnerie se firent habituelles à la fin du XVIIème siècle. © Xabi Otero
77. Assemblages avec des profils en queue d'hirondelle, caractéristiques du XVIème siècle.
77. Assemblages avec des profils en queue d'hirondelle, caractéristiques du XVIème siècle. © Xabi Otero

C’est à l’intérieur, et plus souvent dans le grenier à foin, que l’on apprécie mieux l’âge et la technique de construction des fermes. Un grand nombre d’entre elles ont un gros mur mitoyen qui les divise en deux, mais dans celles qui furent édifiées jusqu’à la moitié du XVIIème siècle, le plus normal est de trouver un squelette formé par d’énormes pilliers qui remontent du sol et traversent le plancher en bois. Si la maison fut construite pendant la seconde moitié du XVIIème ou au début du XVIIIème siècle, il est facile de trouver dans sa structure un grand nombre de fourches d’arbre naturelles et des bras en courbe servant à maintenir les poutres horizontales. Plus tard le bois perdit son rôle de support et son usage se limita aux planchers et au toit.

La menuiserie populaire du XVIème siècle atteignit un niveau de qualité très élevé, et sa présence est facile à reconnaître dans les fermes du Gipuzkoa car elle utilise une technique sophistiquée d’assemblages latéraux avec des silhouettes en courbe qui rappellent les ailes déployées d’un oiseau.

78.	Habe-egitura barrokoa, pieza desberdinen elkargunean jabaloi kurbatuak eta mihiztadura markak dituelarik.
78. Habe-egitura barrokoa, pieza desberdinen elkargunean jabaloi kurbatuak eta mihiztadura markak dituelarik. © Xabi Otero
79. Structure de poutres baroques avec des étais courbes et des marques d'assemblage à l'union des différentes pièces.
79. Structure de poutres baroques avec des étais courbes et des marques d'assemblage à l'union des différentes pièces. © Xabi Otero

Celle de la fin du XVIIème et du début du XVIIIème siècle est totalement différente mais également attirante par les formes arborescentes adoptées par leurs piliers et étais. Les joints entre les différentes pièces portent fréquemment les signes et les marques de montagne effectués par le maître qui conçut la structure.

Les cloisons qui séparaient les chambres de la ferme ont aussi connu des modalités différentes à travers les siècles. Celles du début du XVIème siècle étaient de simples cloisons en planches emboîtées; ensuite, ce furent des cloisons faites avec des branches et des bandes en bois entrelacées et ravalées avec du mortier; et finalement, vers la fin du XVIIème, les cloisons en briques et maçonnerie s’imposèrent et furent celles qui à la longue eurent plus de succès.

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